Quand on parle de tango, tout le monde n’imagine pas la même chose : il y en a qui voient un chapeau sur une tête de macho et une tenue de femme fatale, d’autres des jambes qui s’entrelacent et des poses sensuelles et passionnées… certain·es imaginent même de grandes robes à froufrous comme les Andalouses… ( !)
Le tango est une danse à plusieurs visages. Comment se repérer dans ces différents styles ? D’abord avec un peu d’Histoire, puis en zoomant successivement sur les deux grandes danses qui portent ce nom : le tango de salon ou ballroom, et le tango argentin proprement dit.
Un peu d’Histoire du tango
1880 – Naissance
Le tango naît à la fin du 19e siècle sur les rives du Rio de la Plata, entre Argentine et Uruguay, dans les bas-fonds des villes portuaires. C’est d’abord une musique métissée, qui naît des mélanges culturels de populations issues de tous pays. La danse apparaît par la suite dans ces milieux marginaux. On dit qu’elle se développe dans les conventillos, des immeubles organisés autour d’une cour centrale où vivaient familles et travailleurs des ports.
L’image du tango dansé dans les bordels ou entre hommes marque les esprits : en effet à cette époque la population portègne comportait beaucoup plus d’hommes que de femmes et celles-ci étaient souvent contraintes à la prostitution pour survivre. Les hommes apprenaient à danser entre eux au coin des rues et sortaient ensuite le soir « séduire » les rares femmes qui les entouraient.
1910-1920 – Années folles
Dans les années folles, le tango s’exporte à Paris puis dans toute l’Europe : les salons chics raffolent de cette danse décadente qui colle les corps les uns aux autres. Bientôt, dans les salons de Buenos Aires, on entend dire que les Parisiens et Parisiennes se sont entichés du tango : cette danse d’abord méprisée acquiert alors ses lettres de noblesse et revient avec orgueil dans la bonne société argentine. Le tango est alors la coqueluche des bals huppés de part et d’autre de l’Atlantique.
1960-1970 – Rock’n roll et dictature
Après son âge d’or dans les années 40-50, déjà un peu délaissé avec le succès du rock’n’roll, le tango est carrément interdit sous la dictature. C'est une période sombre en Argentine. Les milongas ferment et ceux et celles qui continuent à danser doivent se cacher.
1980 – Renaissance
Avec la fin de la dictature, puis le spectacle Tango Argentino créé en 1983, qui fait le tour du monde, le tango argentin renaît de ses cendres. Les Argentins durement éprouvés en font un symbole et une fierté nationales. Et surtout, dans toutes les villes du monde, on veut à nouveau apprendre le tango. De nombreux danseurs et danseuses se forment à Buenos Aires et vont s’expatrier pour partager leur danse dans le monde entier.
1990-2000 – Tango Nuevo
Autour des années 2000, un trio de danseurs, Gustavo Naveira, Pablo Veron et Chicho Frumboli, se réunit, pratique, explore et secoue les bases du tango. À la fois pour pouvoir l’enseigner à des cultures nouvelles et pour le faire évoluer en s’inspirant d’autres danses comme la danse contemporaine, le tango devient « nuevo » et prend de nouvelles formes. C’est une époque dorée notamment pour le tango parisien, alors que tous les danseurs et toutes les danseuses les plus modernes et talentueuses sont réunies à Paris.
Plus tard, le tango se mélange à nouveau à des styles traditionnels, et une mode en entraînant une autre, on retrouve des pantalons à pinces et des robes à paillettes. Mais la révolution a opéré et le tango d’aujourd’hui, sous toutes ses formes, intègre les différentes influences qui ont traversé son histoire.
Le tango de salon ou tango ballroom
Lors de sa première arrivée en Europe, dans les années folles, le tango s’est installé et a suivi sa propre évolution : c’est ce qu’on appelle le tango de salon ou tango ballroom. C’est l’image d’Épinal que certain·es ont en tête : les bustes cambrés en arrière, des robes à froufrous, de grandes marches « à l’américaine » bras tendus et des jeux de tête dramatiques.
Le tango de salon inclut plusieurs styles : international, américain et musette. Il fait notamment partie des danses standard dans les compétitions de danse sportive. Voici un aperçu du tango tel qu’il est dansé lors des championnats de tango « ballroom » : 2022 Moscow Championship
Une autre famille de tango résonne aussi avec familiarité, c’est le tango musette ou tango français : celui qu’on entend avec des paroles en français sur un air d'accordéon. Dans la première partie du 20e siècle, de nombreux « tubes » de chanson française ont été composés dans ce genre.
Le tango argentin ou rioplatense
Enfin ! On arrive au tango qui nous intéresse :)
Le tango argentin (qui est celui qui s’est à nouveau répandu à partir des années 1980), comporte lui aussi différents styles. On peut chipoter sur les catégories, mais plusieurs grandes familles se dessinent, descendantes des mille styles qui caractérisaient chaque quartier de Buenos Aires dans l’âge d’or du tango.
Tango milonguero
Ce style est caractérisé par un abrazo “apilado”, dans lequel les partenaires partagent un peu le poids de leur corps en “s’appuyant” l’un contre l’autre. Les bras sont très enveloppants et les dissociations sont rares, on privilégie les croisés face au partenaire, comme dans le « giro milonguero ».
Tango salón
Dans le tango salón (à ne pas confondre avec le tango de salon cité plus haut), les partenaires sont très droits chacun sur leur axe ce qui laisse la place aux pivots et dissociations. Une recherche de netteté et d’élégance est souvent associée à ce style.
Tango escenario
C’est le tango de scène : chorégraphié, très impressionnant, c’est de lui que sont inspirés les amples mouvements de jambe libre des followers.
Vidéos :
Pour aller plus loin, vous pouvez aussi regarder :
du tango canyengue, un style des origines du tango,
ou encore du tango nuevo, le style très délié et inventif des « révolutionnaires » des années 2000.
Et pour approfondir encore ces subtiles différences, vous pouvez consulter cet article très complet sur les différents styles de tango. Ou lire toute la page "Tango (Danse)" de Wikipedia qui est extrêmement bien rédigée.
Et vous, quel style de tango vous attire le plus ?
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